Il est impossible de parler de relance sans parler du projet de loi 61 présenté par le gouvernement de François Legault, à une semaine de la fin des travaux parlementaires. Ayant suscité de nombreuses critiques, le projet de loi n’a pu être adopté avant la pause estivale. Il visait principalement à accélérer la mise en marche de plus de 200 grands projets d’infrastructure, en prolongeant l’état d’urgence aussi longtemps que 2 ans, et ce, en passant outre : « […] l’application de principes établis, dont l’allocation de contrats publics, la gestion de compétences dans le milieu de la construction, les lois d’aménagement et d’urbanisme et, peut-être surtout, les lois environnementales. » (L’état d’urgence illimité, Le Devoir, 10 juin 2020)
Ce que nous dénoncions au printemps par l’adoption de la Loi mammouth sur la réforme des commissions scolaires se retrouvent en plusieurs points dans ce dernier projet de loi omnibus du gouvernement de la CAQ, notamment dans l’érosion du processus démocratique. La nouvelle présidente du Conseil du Trésor, Sonia Lebel, sera responsable de présenter la nouvelle mouture de ce projet à la reprise des travaux parlementaires.
Le 19 juin dernier, le ministre des Finances du Québec, Éric Girard, a présenté le « portrait de la situation économique du Québec – juin 2020 » tenant compte des dépenses engendrées pendant la pandémie. Le Québec est passé d’un surplus budgétaire escompté de 3 milliards de dollars (G$) lors du dépôt du budget en mars, à un déficit attendu de près de 15 G$ pour 2020-2021. Il va sans dire que la pandémie a rapidement chamboulé la situation économique mondiale aussi bien que celle de la province. Le portrait déposé fait essentiellement état des dépenses additionnelles de 6,6 G$, autant pour l’économie qu’en santé (3,7 G$), pour faire face aux crises sanitaires, économiques et sociales découlant de la pandémie. Dans ces investissements, le gouvernement de François Legault a choisi de privilégier le secteur privé. D’ailleurs, il souligne qu’un retour à l’équilibre budgétaire d’ici 5 ans reste sa priorité. Bien qu’il avance que « l’atteinte de cet objectif ne se fera pas au détriment des services publics ou par une hausse du fardeau fiscal des Québécois [et ce, tout en continuant] à bâtir une économie verte » (communiqué de presse du gouvernement du Québec, 19 juin 2020), un retour à l’austérité paraît inévitable pour plusieurs. Il faudra attendre l’automne prochain pour connaître le plan de relance économique qui sera présenté conjointement à la mise à jour budgétaire.
Le document déposé en juin par le gouvernement de la CAQ est donc sans grande surprise, puisqu’il relate les fonds d’urgence octroyés pour répondre à la crise. Le RIOCM avait d’ailleurs répertorié tous les fonds accessibles aux organismes communautaires au cours de la crise. Pensons aux 20 M$ investis au PSOC, 3 M$ en hébergement en dépendance, 2,5 M$ en violence conjugale ou le 10 M$ en soutien à l’action communautaire. Le gouvernement souligne d’ailleurs que ce sont là des investissements temporaires. Vous noterez qu’un important fonds d’urgence, accordé aux organismes communautaires famille (OCF) et haltes-garderies, n’apparaît pas distinctement au document. Tout porte à croire que le gouvernement de François Legault a choisi de prélever ce fonds d’urgence à même le rehaussement du financement à la mission de base des organismes, annoncé au budget 2020-2021, et qui lui devait être récurrent.
Au final, alors que nous pressons les gouvernements à réinvestir massivement dans les programmes sociaux et services publics, nous craignons un retour à l’austérité et à un recours encore plus marqué au privé. Or, de nombreuses inégalités perdureront au-delà de la crise sanitaire. Nous espérons donc que les 4 M$ réservés pour les imprévus d’ici la fin de l’année seront bonifiés et serviront à amenuiser les inégalités sociales exacerbées par la crise.