Retour sur le Programme de soutien aux organismes communautaires (PSOC)

La crise force les organismes à se « réinventer », à s’adapter, pas seulement pour répondre aux mesures sanitaires et aux besoins émergents, mais aussi pour obtenir les financements assurant leur survie. Au cours de la première et la deuxième vagues, certains groupes ont dû mettre en veille leur rôle de transformation sociale pour se concentrer sur les services à offrir. Plusieurs ont aussi dû restreindre l’espace démocratique à un rassemblement virtuel pour remplir leurs obligations légales. L’obligation de tenir une assemblée générale annuelle (AGA) a été levée très tard à l’automne, après des mois de négociations, ce qui a poussé de nombreux groupes à les organiser malgré tous les défis et limites que cela pose.

 

  • Fonds spéciaux : aide rétroactive et ponctuelle ne répondant pas au besoin

Pourtant, une soif de mise en commun des expériences et la volonté de recommencer à accueillir les participants et participantes dans les locaux pour poursuivre les luttes se font bien sentir. Bien que la COVID-19 n’ait pas réussi à altérer le goût de l’engagement dans le mouvement d’action communautaire autonome (ACA), des groupes pourraient ne pas survivre à la pandémie. En particulier, les groupes les moins financés à la mission globale qui ne pourront pas compter sur les campagnes de financement et l’autofinancement, ainsi que les organismes qui, ironiquement, n’ont pas les « moyens » d’accéder aux fonds spéciaux du gouvernement du Québec, parce qu’ils n’ont pas les ressources humaines pour remplir les rééditions de compte imposantes ou parce qu’ils n’ont pas les réserves financières pour risquer d’accumuler un déficit en maintenant ou en intensifiant leurs activités. En fait, le fonds spécial annoncé pour pallier les pertes de revenus d’autofinancement (70 M$) n’est finalement accessible qu’aux organismes capables de démontrer un déficit pour la première vague de la pandémie, soit jusqu’au 30 septembre dernier. En agissant de manière rétroactive, le gouvernement rate sa cible.

Ce fut également le cas pour les fonds spéciaux en santé mentale (17 M$, puis 10 M$) pour augmenter les services offerts par les organismes. Le premier fonds dédié à l’embauche de personnel est arrivé tard à l’automne, alors qu’il était censé couvrir l’année 2020-2021 jusqu’en mars. Cela forçait les organismes à embaucher une ressource pour quelques mois seulement, ce qui n’est ni souhaitable ni viable, en plus d’être très difficile. Ainsi, malgré les besoins exponentiels de la population, plusieurs organismes ont fait le choix de ne pas demander d’aide dans le cadre de cette enveloppe ciblée. Heureusement, le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant, a annoncé un nouvel investissement de 10 M$ pour prolonger ce fonds spécial pour l’année 2021-2022. Toutefois, les autres mesures prévues pour diminuer les listes d’attente pour obtenir des services en santé mentale font craindre le départ du personnel du milieu communautaire vers le réseau public offrant de meilleures conditions de travail. Tous s’entendent pour dire que les investissements annoncés restent grandement insuffisants.

En réponse à la migration des ressources vers le réseau public, nous saluons néanmoins l’investissement gouvernemental qui permet de bonifier les salaires dans les entreprises d’économie sociale en aide à domicile (EÉSAD) et pour les personnes qui offrent des services de soutien à domicile dans le cadre du chèque emploi-service. Cela réduira certainement l’exode des travailleurs et travailleuses prenant soin de nombreuses personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie et personnes âgées demeurant chez elle.

Cela dit, la pandémie se poursuit et les proches aidants s’épuisent. Dans tous les milieux offrant des soins et services de première nécessité, le personnel, majoritairement féminin, est à bout de souffle. Le milieu communautaire ne fait pas exception. Les syndicats ne sont pas les seuls à dire qu’il est plus que temps de réinvestir dans le réseau public, autant en éducation que dans le secteur de la santé.

 

  • Rehaussement du PSOC

Annoncée au budget déposé en mars dernier, la répartition du rehaussement du financement à la mission globale pour les organismes financés au PSOC est maintenant réalisée et elle devrait être adoptée le 10 décembre par le CA du CIUSSS Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. Le processus a été très rapide, contrairement à l’année dernière, notamment en l’absence de critères additionnels imposés par le Ministère. Cela a permis d’appliquer le mécanisme prévu au cadre régional visant à réduire les inégalités de financement entre les organismes ayant la même mission (typologie). Les groupes devraient recevoir prochainement l’annonce officielle du rehaussement qui leur est accordé.

 

  • Nouveau cadre de gestion ministériel du PSOC

L’automne marque la fin de la première phase des travaux de révision du cadre de gestion ministériel du PSOC pour le financement à la mission globale. Bien que les thématiques en négociation soient connues depuis l’ouverture de ce chantier en 2016-2017, nous avons enfin découvert la teneur des changements apportés au terme des travaux tenus à huis clos, comme l’a exigé le gouvernement de François Legault. Les discussions ont eu lieu entre les représentants du ministère de la Santé et des services sociaux (MSSS), certains CISSS/CIUSSS et la Coalition des tables régionales d’organismes communautaires (CTROC) et la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles (TRPOCB), qui sont les deux organismes interlocuteurs privilégiés du communautaire auprès du MSSS pour le PSOC. Retenons que le changement majeur consiste à restreindre le financement à la mission globale aux groupes démontrant leur adhésion aux huit critères de l’action communautaire autonome (ACA). Des rencontres d’information sur les changements majeurs apportés au cadre ministériel sont organisées par le RIOCM et d’autres regroupements sectoriels montréalais au cours des prochaines semaines et mois. Aussi, une deuxième phase des travaux visant notamment à définir les autres modes de financement du programme débutera en début d’année prochaine.